Genre musical apparu dans les pays anglophones au cours des années 1950 et basé sur des éléments empruntés au blues, au rhythm and blues et au rock'n'roll, le rock gagna la Suisse un peu plus tard. Les grands concerts donnés au Hallenstadion de Zurich par le groupe britannique Rolling Stones en 1967 et par le guitariste vedette Jimi Hendrix en 1968 marquèrent les esprits; ils se terminèrent en émeutes et donnèrent lieu à de violentes interventions policières contre les jeunes. Bientôt se développa un mouvement actif avec ses lieux de rencontre, ses médias et ses petites maisons de disques.
Toni Vescoli et ses Sauterelles passaient pour les Beatles suisses, tandis que le groupe Krokodil fondé par Düde Dürst et Hardy Hepp mêlait au blues des éléments psychédéliques. Les Minstrels et le groupe des Rumpelstilz formé autour du chanteur et parolier Polo Hofer signèrent dans les années 1970 les premiers succès du rock en dialecte alémanique. L'usage du dialecte (notamment par Patent Ochsner et Züri West) devint plus tard la marque distinctive d'un rock spécifiquement suisse, ayant son centre névralgique à Berne; le chansonnier bernois Mani Matter en fut l'une des figures tutélaires, comme le montre le disque Matter Rock (1992), où plusieurs de ses chansons sont reprises à titre d'hommage par d'autres artistes. Le groupe de hard rock soleurois Krokus (avec le chanteur Chris von Rohr), les Zurichois Dieter Meier et Boris Blank du groupe Yello, dont le style expérimental (dancebeat) exploitait les possibilités de l'ordinateur et de l'échantillonneur, connurent un succès international dans les années 1980. Le groupe féminin Kleenex (Liliput dès 1980), issu du milieu punk et wave suisse, conquit le public anglais. Stephan Eicher, venu de la scène punk bernoise, réussit à s'imposer dans le monde francophone. Les Young Gods fribourgeois acquirent une renommée internationale à la fin des années 1980 dans le style du rock industriel. Le disque-jockey argovien René Baumann prit place dans les hit-parades internationaux au milieu des années 1990, sous le nom de DJ Bobo. On connaît dans toute la Suisse le groupe romand Sens Unik (hip-hop) et le groupe tessinois Gotthard (hard rock). Dans le domaine du hip-hop, les rappeurs Bligg (Marco Bliggensdorfer), Greis (Grégoire Vuilleumier) et Stress (Andres Andrekson) ont attiré l'attention.
La Rote Fabrik, ouverte en 1980 à Zurich, devint rapidement l'un des principaux centres du rock suisse. Elément de la culture populaire et de la culture des jeunes, le rock se vit légitimé, dès les années 1980, grâce à sa diffusion par les grands médias et les canaux commerciaux, pour son rôle dans l'économie de la consommation (Musique, Jeunesse, Radio). Dans le domaine de l'organisation de concerts, le marché suisse est dominé au début du XXIe s. par André Béchir et son agence Good News (une centaine d'événements et 600 000-800 000 auditeurs par an). A partir de la revue Pop, créée à Zurich en 1965, Jürg Marquard a bâti un groupe de presse international. Parmi les grands festivals de musique programmant des concerts de rock, citons ceux de Berne, Frauenfeld, Montreux, Nyon et Saint-Gall. Des concerts en plein air de stars internationales sont régulièrement donnés dans des stades de football. Des villes comme Bâle, Berne, Lucerne et Zurich offrent des prix, des bourses d'études et des subventions à la production.